Vouloir un enfant parfait
Sommaire
Dossier Vouloir un enfant parfait
(EDUCATION)
- A père modèle, fils parfait Etienne de Montety
- Dangereuse perfection Geneviève de Taisne
- Quand un père parle de ses trois enfants Témoignage
- L'acharnement éducatif Emmanuel Naquet
- Le vilain petit canard Isabelle Philippon
- Comment les parents découvrent ce à quoi Dieu appelle leurs enfants Xavier de Chalendar Méditation
( BIOETHIQUE )
- La demande d'enfant parfait Françoise Pinguet
- Une solitude angoissante Témoignage
- Techniques nouvelles et liberté des chrétiens Michèle Guy
- "Vous la gardez ?" Témoignage
- Si nous disons oui... Marie-Hélène Mathieu
- Bien naître: toute une histoire Olivier de Dinechin
- "Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait" Georgette Blaquière
- Chroniques
- Parents-Enfants: Les ressources de la fratrie Jacques Arènes
- L'oeil et la plume
- Le mariage au fil du temps: Pierre Lombard, un maître sur le mariage pour cinq siècles Michel Rouche
Alliance Infos Monique Rouche
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Editorial
Nous sommes tous des rêveurs. Et nos rêves sont dangereux, parce qu'ils révèlent notre désir caché de toute-puissance. Nous imaginons nos enfants comme des surdoués qui combleront toutes nos frustrations, répareront nos erreurs et ne subiront pas ce que nous avons souffert. Cette pression sur eux est d'autant plus forte que dans un monde instable et violent, ils demeurent la seule valeur sûre. Et nous voudrions tellement être de bons parents ! Ah ! Le perfectionnisme !
Il serait peut-être bon de rappeler que nous ne sommes pas propriétaires de nos enfants, qu'eux-mêmes ont des rêves et des projets, sans oublier Dieu qui lui aussi a un désir sur eux, et qui les appelle à une vocation que dérangent notre acharnement éducatif et notre absence de discernement. Nous préférons toujours que notre fils soit ingénieur plutôt que moniteur de planche à voile ! Ah, la réussite sociale, miroir aux alouettes ou miroir piégé ?
Il n'est que temps de se révoUer contre ce bon sens à gros grains, car il constitue un piège insidieux. C'est parce que nous sommes obsédés par cette perfection sociale que nous forgeons le mythe de l'enfant parfait. Nous devenons alors complices d'un eugénisme rampant. Nous étendons notre demande de succès scolaire faite au professeur, au domaine biologique. Nous réclamons au médecin un enfant "zéro défaut". "Je veux savoir". Qu'y a-t-il de plus normal ?
Mais le pouvoir médical est bien plus efficace que celui du professeur. De l'échographie, on passe à l'amniocentèse et à la question: "Vous le gardez ?" Puis, avec le diagnostic pré-implantatoire, on va fabriquer un embryon sans aucune maladie génétique. La pression est telle (peur du handicap, peur du procès) qu'on en est arrivé à l'arrêt Perruche.
Désormais les joies de l'attente sont remplacées par le stress; à force de conseiller l'avortement pour l'enfant handicapé, même lorsque le diagnostic est ambigu, le risque n'est plus pris en compte et il deviendra de plus en plus difficile de chercher à guérir la maladie ou le manque handicapant. Il est donc indispensable de faire pression sur le corps médical pour qu'il cherche à guérir tout handicap. Bref, trouvons une solution médicale au problème au lieu de suggérer la suppression du problème, c'est-à-dire de l'enfant.
Rappelons que l'accueil de la vie, don de Dieu, n'implique pas l'acceptation passive de la souffrance, mais un regain d'amour pour cet être blessé. Nos rêves de perfection sont handicapants. Or nous sommes tous imparfaits, répétons-le. Dans "Certains l'aiment chaud' le miDiardaire qui demande la main de Tony Curtis travesti en femme répond à son refus: "Personne n'est parfait !". La Bible avait déjà ré-orienté notre désir en donnant l'ordre à tous les humains: "Soyez parfaits comme le Père céleste est parfait" Autrement dit, non seulement "faire avec", comme on dit, mais vouloir que se loge dans notre imperfection cette perfection déroutante qu'est la sainteté du Christ: "Moi, un saint, allons donc !" dites-vous. Encore une ruse de la recherche de l'humaine perfection que cette fausse humilité. Imitons l'enfant dans sa faiblesse.
Michel Rouche

